Le Da vinci code révélé


Cette semaine, j'ai beaucoup parlé du Da Vinci Code à mes élèves. J'ai analysé le livre en leur montrant la supercherie intellectuelle, j'ai vu le film avec quelques élèves (après le cours bien sûr). Devant la déferlante médiatique, j'ai pris le parti de répondre et de discuter avec eux plutôt que de condamner et de boycotter. C'est finalement une excellente accroche pour faire un peu de culture religieuse et historique. Plusieurs travaux m'ont aidé pour creuser le sujet.

D'abord un excellent documentaire britannique que j'ai enregistré sur la chaîne Planète le 3 avril. Il démonte point par point les allégations de Dan Brown en s'appuyant sur des historiens spécialiste du Moyen-Age et des origines du christianisme. Ce documentaire s'appelle Le Da Vinci Code révélé :
L'acteur Tony Robinson (voir photo à côté) s’est lancé dans sa propre quête du Graal pour démêler les éléments de fiction des faits historiques auxquels se réfère le Da Vinci Code. Pour cela, il s’est rendu du Moyen-Orient aux Etats-Unis en passant par l’Italie, l’Espagne, la France et l’Angleterre, et bien sûr, sur les lieux de l’intrigue. Sa conclusion est sans appel : le plus grand canular de tous les temps ! Un tissu de mensonges. Le documentaire démonte la prétendue véracité des faits, documents et témoignages secrets sur lesquels s'appuie Dan Brown (Prieuré de Sion, templiers, cathares, Léonard de Vinci, Marie-Madeleine).

Je me suis aussi beaucoup documenté en lisant le livre de Marie-France Etchegoin, journaliste et Frédéric Lenoir, directeur du Monde des religions : Code Da Vinci : L'enquête. Il met au jour les erreurs et les inventions de l’auteur, ainsi que ses sources véritables, en particulier "L'Enigme sacrée", best seller des années 80, écrit par trois journalistes, spécialiste en littérature ésotérique.
Pour ceux que l'affaire intéresse, j'ai mis en ligne une petite synthèse de mes réflexions à partir du livre de Frédéric Lenoir.
  • Concernant l'Opus Dei, pour se faire une idée juste, voici quelques notes extraites de leur site :
L’Opus Dei est introduit dès la première page du Da Vinci Code. Le préambule intitulé « Les faits » présente en effet, en parallèle, « la société secrète du Prieuré de Sion » et l’Opus Dei. Contrairement à ce qui est indiqué, le Prieuré de Sion n’a pas été fondé en 1099 : c’est une supercherie forgée de toutes pièces dans le milieu des années 1960 par quelques personnages douteux. En revanche, l’Opus Dei existe bel et bien. Mais la présentation qui en faite dans cette page du roman, et tout au long de l’intrigue, est totalement erronée, tant du point de vue général que dans d’innombrables détails.
On peut dire en synthèse que le Da Vinci Code présente de l’Opus Dei une image exactement inversée : inversion du statut de ses membres qui, alors qu’ils sont des fidèles chrétiens courants, sont présentés comme des moines ; inversion des valeurs qui les animent, présentées comme dangereuses, voire criminelles, alors que l’esprit de l’Opus Dei est entièrement conforme à la doctrine et la morale chrétienne ; inversion de l’attitude de l’Opus Dei à l’égard du monde et de l’Église, présentée comme rétrograde, alors que l’Opus Dei a été depuis longtemps reconnu comme un des précurseurs du concile Vatican II.
Il serait absurde de s’appuyer sur le Da Vinci Code pour se faire une quelconque opinion sur l’Opus Dei. On pourra en revanche se reporter à la présentation de l’Opus Dei authentique donnée dans L’Opus Dei, de Dominique Le Tourneau (PUF, collection Que sais-je ? n° 2207).
Enfin, pour les passionnés, je propose une précieuse mise au point concernant les évangiles apocryphes. A ce sujet, Dan Brown cite l'Evangiles de Philippe pour prouver une relation entre Jésus et Marie-Madeleine. Cet évangile gnostique dit que "Jésus embrassait souvent Marie-Madeleine sur la bouche". Bizarrement, après nous avoir dit que tout était codé, qu'il y avait des signes partout, Dan Brown prend ces paroles au sens littéral alors qu'il s'agit à l'évidence du symbole de l'initiation, la bouche étant liée au souffle et donc à l'esprit. L'union charnelle n'est que la figure de l'union spirituelle (cf. le Cantique des cantiques). Les gnostiques méprisaient le corps mais utilisaient tous les registres de la symbolique biblique.
Je signale aussi le dossier en ligne de la revue Historia qui propose des analyses critiques et des documents approfondis :

- Mode d'emploi
- Une véritable contrefaçon
- Un bon roman, un bon romancier
- En quête du Grand Secret
- Contre-enquête d'Historia
- Dan Brown brode autour de la théorie du complot
- Une oeuvre pour initiés
- Léonard de Vinci
- Contre-enquête d'Historia
- La Vierge aux rochers
- Contre-enquête d'Historia
- La Cène
- Contre-enquête d'Historia
- La vie amoureuse de Jésus
- Contre-enquête d'Historia
- Le Saint-Graal
- Les nouveaux mystères de Paris
- Contre-enquête d'Historia

Le point de vue d'un théologien :
Avant même que le christianisme ne soit blessé, c’est la culture qui est insultée. Il faut vraiment être arrivé à un véritable effondrement de la culture pour qu’un fatras de mensonges comme celui-là puisse apparaître un tant soit peu sérieux. Un tel abandon de l’intelligence ne préfigure pas de beaux lendemains pour l’idée même de culture. Le véritable problème du Da Vinci Code, c’est la haine de soi d’une civilisation qui en vient à considérer ses mythes fondateurs comme des mensonges et leur préfère de réels mensonges totalement pathétiques. La civilisation chrétienne tiendrait à un misérable petit secret sous la couette ? Voilà ce que la théorie du complot peut donner à l’échelle d’une civilisation. Habituellement diabolisée, la voici ici sacralisée, sans se rendre compte qu’elle prépare, à cause de l’effacement culturel qu’elle provoque, une sorte d’assoupissement totalitaire.
Jean-François Colosimo, La Croix, 17 mai 2006

Un site très complet à consulter : http://www.davinci-codex.com

Commentaires

Anonyme a dit…
Intéressant billet, Nicomaque... "La haine de soi d'une civilisation qui préfère considérer ses mythes fondateurs comme des mensonges", c'est (malheureusement) assez bien vu aussi.

Ce qui est amusant, c'est que, depuis quelque temps, les gens que je rencontre protestent tous du fait qu'ils n'ont jamais pris le livre pour autre chose qu'une fiction. De là à dire qu'il n'y a rien de vrai dessous... ils ne franchissent pas le pas.

Sur l'Opus Dei, je me permets aussi de signaler un livre que je viens d'achever : L'Opus Dei, enquête sur le "monstre", de Patrice de Plunkett, une enquête bien étayée, qui permet au moins de recouvrer un peu de son esprit critique.

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