La banalité du mal
Réfugiée aux Etats-Unis pendant la guerre, et donc protégée physiquement, Hannah Arendt eut toutes les audaces intellectuelles, au point d'exaspérer maintes fois la communauté juive. Vivante alors qu'elle pensait devoir être morte, elle stigmatisera l'inaction des Juifs face au génocide, jusqu'à les rendre pour ainsi dire coupables du malheur advenu. Cette morale de combat, qui incluait le refus de toute «victimisation», est omniprésente chez elle. C'est en journaliste que Hannah Arendt assistera en 1961 à Jérusalem, quinze ans après Nuremberg, au procès-spectacle d'Adolf Eichmann, l'ingénieur de la déportation. Ne voyant en lui ni un monstre ni un démon, mais un homme ordinaire, un fonctionnaire inapte à réfléchir à ses actes mais voué à appliquer scrupuleusement les consignes, elle récusera l'idée de mal radical pour conclure à la banalité du mal. Elle pensait que les organisateurs de génocides n'étaient pas pires que d'autres avant eux, mais