In memoriam James A. Sadowsky, sj. (1923-2012)

Le père James Sadowsky est mort à 89 ans le 7 septembre dans sa chambre à  l'infirmerie des Jésuites sur le campus de l'Université de Fordham, où il avait enseigné la philosophie à partir de 1960 jusqu'à sa retraite en 1998. Fondée en 1841, Fordham est l'université jésuite de New York, située dans le Bronx. Elle offre une éducation d'excellence, fondée sur la tradition jésuite et accueille plus de 15000 étudiants. 

James Sadowsky et Murray Rothbard étaient amis et on collaboré ensemble à partir du début des années 1960 jusqu'au décès de ce dernier en 1995. On peut dire qu'ils se sont largement influencés mutuellement.

Dans un entretien avec Martin Masse, il raconte : 
« Un jour, je suis allé à la bibliothèque et j'ai cherché des livres sur la dépression des années 30. J'ai regardé dans la section d'économie et un peu par hasard, j'ai choisi America's Great Depression par Murray Rothbard. (...) Ensuite, j'ai découvert qu'il avait écrit d'autres choses, comme Man, Economy and State, que j'ai lu. J'ai été surpris parce que je pensais que l'économie était mathématique, mais il y avait relativement peu de maths dans les livres de Murray. Ensuite, je me souviens avoir lu cette brochure appelée État, qu'as-tu fait de notre monnaie ? et là j'ai vu qu'il vivait à Manhattan. Alors j'ai cherché Murray Rothbard dans l'annuaire téléphonique et lui a téléphoné. Et il m'a dit: pourquoi ne pas nous retrouver pour dîner quelque part ? Ce que j'ai fait. Nous avons donc parlé et... de là vient ma conversion à l'économie de marché ». 
Son article de 1966 sur la propriété ("Private Ownership and Collective Ownership") est devenu un classique. Il commence ainsi : 
« Je vous propose de tenter une justification de la propriété privée, puis d'analyser le terme "propriété collective". J'espère montrer que ce dernier terme est dénué de sens. Malheureusement, il est souvent supposé avoir un sens et cela est souvent tenu pour acquis, même chez certains des défenseurs de la propriété individuelle ». 
La notion de droit s'applique à des individus et non à des collectivités. Or l'un de ces droits est le droit de s'approprier les biens qui sont sans propriétaire. Ce droit procède logiquement de la propriété de soi. Or, comme le montre Sadowsky, le déni de ce droit conduit à une contradiction. Il écrit : 
« Supposons maintenant que je déploie mon activité sur des marchandises n'appartenant à personne. De quel droit quelqu'un peut-il m'arrêter ? Il n'y a que deux justifications possibles : soit il a le droit de diriger mes activités en usant de violence (en d'autres termes, je suis son esclave), soit il est déjà propriétaire des biens matériels en question. Mais cela contredit les hypothèses que nous avons faites : que chaque être humain s’appartient lui-même en propre et que les biens matériels en question ne sont pas déjà possédés. La seule question ouverte est de savoir si l'autre homme avait acquis le terrain pacifiquement avant moi. Mais soulever cette question c’est déjà concéder le droit de propriété privée, que nous essayons de démontrer. »
En 1984, Sadowsky est devenu membre de la Société du Mont Pèlerin  fondée par Hayek en 1947 en Suisse. Et à l'invitation de Jacques Garello, il s'est rendu 15 années de suite à l'Université d'été de la nouvelle économie, dans les locaux de l'Université d'Aix. Dans les années 60, l'un de ses élèves s’appelait Mario Rizzo. Aujourd'hui ce dernier est professeur à NYU, et dirige le département d'économie autrichienne. Le père Sadowsky avait coutume d'enseigner la logique à partir du livre Principles of Logic, d'un autre jésuite : le père George Hayward Joyce (télécharger ce livre sur archive.org). 

Requiem aeternam dona ei, Domine, et lux perpetua luceat ei.


Interviews
Ethics and Capitalism, El Mercurio (Chili, 1987)
A Conversation with James Sadowsky, Philosopher of Freedom, Le Québécois Libre (Montréal, 2003)


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