De la justification morale de la peine
Cher Kaplan votre mise au point concernant la philosophie pénale en termes de calcul coût-bénéfice est tout à fait pertinente mais je voudrais y ajouter deux ou trois choses sur lesquelles nous serons peut-être en désaccord.
Nous sommes je pense d'accord sur un point : c'est le traitement « social » du crime qui a conduit à diaboliser la dissuasion depuis les années 50. C’est-à-dire l’idée que les causes profondes de la criminalité résideraient dans l’inégalité des revenus et dans les injustices sociales comme le racisme ou la discrimination. Selon ce point de vue "socialisant", les criminels seraient d’abord des victimes.
En réalité, comme votre billet tend à le montrer, ce n’est pas la pauvreté qui engendre le crime, c’est l’opportunité d’un gain facile et sans risque. Le comportement criminel est donc une réponse rationnelle à des incitations et des opportunités. La criminalité baisse ou augmente en réponse à ses coûts attendus en termes de probabilité de punition.
Or je crois qu’il ne faut pas seulement réhabiliter la fonction dissuasive de la peine mais qu’il faut aussi, allons plus loin, réaffirmer l’idée qu’un crime est punissable parce qu’il est en lui-même une injustice commise contre les droits d’un ou de plusieurs individus. La punition doit, bien entendu, être strictement proportionnelle au crime.
Il y a donc une double utilité de la peine : dissuasive et morale. Et sans une conception morale objective du droit, on continuera à traiter le criminel comme une victime et on sera toujours enfermés dans une fausse alternative : laxisme ou répression aveugle.
En résumé : Il y a deux types de justifications de la peine et les deux sont complémentaires :
La première est conséquentialiste. Une action doit être jugée à ses conséquences. Ainsi la punition est justifiée par ses conséquences sociales désirables : dissuader les futurs criminels de passer à l’acte (sécurité publique).
L’autre justification de la peine est déontologique. Déontologie est un terme qui renvoie à la morale et qui signifie qu’une action humaine doit être jugée selon sa conformité (ou sa non-conformité) à certaines normes morales objective, inhérentes à la nature rationnelle de l’homme.
Cette approche morale permet de rendre à chacun le sens de sa dignité. La victime est reconnue dans son innocence et dans ses droits, tandis que le criminel doit rendre des comptes et il est reconnu dans sa liberté de sujet rationnel, capable de choix responsables. Le but ici n’est plus seulement de garantir la sécurité publique mais de restaurer la responsabilité individuelle et de promouvoir le respect des droits de chacun.
Le problème est que les intellectuels ont éliminé la culpabilité en combattant systématiquement les valeurs et les normes sur lesquelles repose la liberté. Au cours des années 60, on a introduit de fausses idées philosophiques sur l’homme et la société permettant d’excuser les comportements déviants et criminels : le déterminisme social, l’exploitation des pauvres par les riches, l’idée que la raison serait en faillite et qu’une morale rationnelle ne pourrait être formulée, l’idée que les valeurs seraient relatives… etc. etc.
Bref, pour conclure je dirais que la dissuasion a été affaiblie, certes, mais aussi et surtout que la conscience morale a été pervertie. Ou, pour le dire autrement, le déclin de l’idée de responsabilité individuelle et la négation du droit de propriété sont à l’origine de la faillite du système pénal et de l’explosion de la criminalité.
La réponse de Kaplan à ma réponse : Lettre à Nicomaque
Voir aussi :
http://www.contrepoints.org/2011/11/19/56505-de-la-justification-morale-de-la-peine/
(Ma réponse à la réponse de Kaplan à ma réponse ne va pas tarder !!)
Nous sommes je pense d'accord sur un point : c'est le traitement « social » du crime qui a conduit à diaboliser la dissuasion depuis les années 50. C’est-à-dire l’idée que les causes profondes de la criminalité résideraient dans l’inégalité des revenus et dans les injustices sociales comme le racisme ou la discrimination. Selon ce point de vue "socialisant", les criminels seraient d’abord des victimes.
En réalité, comme votre billet tend à le montrer, ce n’est pas la pauvreté qui engendre le crime, c’est l’opportunité d’un gain facile et sans risque. Le comportement criminel est donc une réponse rationnelle à des incitations et des opportunités. La criminalité baisse ou augmente en réponse à ses coûts attendus en termes de probabilité de punition.
Or je crois qu’il ne faut pas seulement réhabiliter la fonction dissuasive de la peine mais qu’il faut aussi, allons plus loin, réaffirmer l’idée qu’un crime est punissable parce qu’il est en lui-même une injustice commise contre les droits d’un ou de plusieurs individus. La punition doit, bien entendu, être strictement proportionnelle au crime.
Il y a donc une double utilité de la peine : dissuasive et morale. Et sans une conception morale objective du droit, on continuera à traiter le criminel comme une victime et on sera toujours enfermés dans une fausse alternative : laxisme ou répression aveugle.
En résumé : Il y a deux types de justifications de la peine et les deux sont complémentaires :
La première est conséquentialiste. Une action doit être jugée à ses conséquences. Ainsi la punition est justifiée par ses conséquences sociales désirables : dissuader les futurs criminels de passer à l’acte (sécurité publique).
L’autre justification de la peine est déontologique. Déontologie est un terme qui renvoie à la morale et qui signifie qu’une action humaine doit être jugée selon sa conformité (ou sa non-conformité) à certaines normes morales objective, inhérentes à la nature rationnelle de l’homme.
Cette approche morale permet de rendre à chacun le sens de sa dignité. La victime est reconnue dans son innocence et dans ses droits, tandis que le criminel doit rendre des comptes et il est reconnu dans sa liberté de sujet rationnel, capable de choix responsables. Le but ici n’est plus seulement de garantir la sécurité publique mais de restaurer la responsabilité individuelle et de promouvoir le respect des droits de chacun.
Le problème est que les intellectuels ont éliminé la culpabilité en combattant systématiquement les valeurs et les normes sur lesquelles repose la liberté. Au cours des années 60, on a introduit de fausses idées philosophiques sur l’homme et la société permettant d’excuser les comportements déviants et criminels : le déterminisme social, l’exploitation des pauvres par les riches, l’idée que la raison serait en faillite et qu’une morale rationnelle ne pourrait être formulée, l’idée que les valeurs seraient relatives… etc. etc.
Bref, pour conclure je dirais que la dissuasion a été affaiblie, certes, mais aussi et surtout que la conscience morale a été pervertie. Ou, pour le dire autrement, le déclin de l’idée de responsabilité individuelle et la négation du droit de propriété sont à l’origine de la faillite du système pénal et de l’explosion de la criminalité.
La réponse de Kaplan à ma réponse : Lettre à Nicomaque
Voir aussi :
http://www.contrepoints.org/2011/11/19/56505-de-la-justification-morale-de-la-peine/
(Ma réponse à la réponse de Kaplan à ma réponse ne va pas tarder !!)
Commentaires
Aussi, je pense qu'il faudrait souligner la responsabilité de chacun vis à vis d'autrui, et vis à vis de la collectivité. C'est la morale, mais dit d'une façon plus politiquement correct. Ce vocabulaire permet de contredire ceux qui excuses les criminels.
On peut aussi insister sur la défaillance de l'éducation. Pourquoi tant de personnes issues de milieux modestes ne sont-elles pas tombées dans la délinquance à d'autres époques, alors qu'elles venaient de bien plus bas? Enfin, à la dissuasion et à la responsabilité envers la collectivité, j'ajouterai l'absence d'espoir comme cause de délinquance. Après guerre, il y avait l'espoir que l'effort paierai. Aujourd'hui, cet espoir n'est plus, pour beaucoup, tandis qu'on leur fait miroiter l'argent facile de l'assistance. Cette dernière est nécessaire, mais devrait aider chacun à s'accomplir.
Toutes mes excuses pour le caractère décousu de ce commentaire, c'est une réaction à chaud!